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NIJOTEW — NIJOTEK
Nijotew ou Nijotek (les jumeaux)) Tête-de-boule, cris.

Ce nom désigne deux rapides de la rivière Mikiskan ; ils encerclent d’abord une île, puis ils s’unissent en un seul rapide.

L’habileté des Indiens dans la descente des rapides est incontestable. C’est l’Indien de l’avant qui gouverne le canot, évitant les vagues dangereuses et les pierres. Dans le danger on modère le canot en plongeant profondément l’aviron, car l’eau profonde est moins rapide que celle de surface.

Avant la descente, l’Indien de l’avant se lève, examine le courant et les passes dangereuses, puis il lève l’aviron et indique à son compagnon la route à suivre. Alors le canot se risque dans le courant. L’eau bouillonne, mugit, écume ; les rochers du fond semblent surgir ; l’esquif saute sur les vagues ou plonge dans des caves. Des coups d’aviron énergiques Évitent les écueils ou « oreilles de charrue ». Enfin, parvenu au pied du rapide, il faut se défier des remous, des bois flottants ou à demi submergés. Pendant la descente, on n’entend aucune parole, chacun étant occupé : il y va de sa vie. Lorsque les rapides sont trop dangereux, on soulage le canot d’une partie de sa charge, et le missionnaire marche dans le portage. Arrivé à l’autre bout, il attend souvent dix ou quinze minutes, et parfois davantage, car le canot tarde à se montrer. Inquiet, il interroge les eaux bouillonnantes, il craint d’y découvrir des épaves, des débris de canot. Et les minutes s’allongent ! Tout à coup, le canot surgit comme une flèche. Le missionnaire descend au bord de l’eau, saisit la frêle embarcation d’écorce que le mouvement des eaux secoue. Oubliant qu’il se mouille les pieds, il s’enquiert des raisons du retard, des difficultés. Comme on se sent heureux, hors du danger et de l’angoisse ! Merci mon Dieu !

NIKIK PAWISTIK
Nikik pawistik (le rapide de la loutre) Tète-de-boule, cris.
Racines : Nikik : loutre ; pawistik : rapide.

Le Nikik Pawistik est un des nombreux et fougueux rapides de la rivière Saint-Maurice. On y a construit le barrage Gouin, généralement appelé « barrage La Loutre », lequel a maintenant formé un lac artificiel de 125 milles de longueur, élargi de baies profondes. Il a fallu trois ans de pluies et de fonte des neiges pour remplir cet immense bassin qui, avec deux pieds de plus en hauteur, débor-

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