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qu’elles ont signifié. La danseuse nous raconte une histoire qu’elle ne comprend pas ; elle danse peut-être en sanscrit comme un bonze fait sa prière.

Troisième plat : lamelles de taï cru. Le taï est un gros poisson rouge que l’on représente souvent avec le dieu Yebis. C’est un excellent manger, — quand il est cuit ; — il rappelle la dorade et la surpasse en succulence. Ces lamelles, d’un rose pâle, sont servies dans un plat bleu à dessin blanc, et posé sur une petite grille de cristal sous laquelle on a glissé une feuille de laurier sombre ; pour compléter l’harmonie du mets, un peu de purée de radis vert pomme fait camaïeu avec la feuille de laurier et lie entre eux tous ces tons bleus, verts et roses. Avec ce plat on apporte une tasse de porcelaine de Koutani rouge et or, dans laquelle on a versé la fameuse sauce japonaise (shoio). Chaque morceau de poisson saisi avec les baguettes est trempé dans la tasse ; c’est là le régal des Japonais et le mets national par excellence.

À ce moment la guesha ouvre un éventail et exécute un pas des plus gracieux. Seulement Félix en trouble l’ordonnance, pour faire de temps en temps arrêter la jeune fille, dont les mouvements sont si variés que le crayon rapide de l’artiste n’a plus le temps d’en fixer un seul.

La danseuse porte une robe grise transparente sous laquelle on devine un vêtement d’un rouge vif. Ses manches sont longues et sa ceinture est écarlate. Son éventail est couleur d’argent.

Est-ce que la musique japonaise serait comme les œuvres des grands maîtres qu’il faut entendre plusieurs fois pour y trouver du charme ? Il