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Grassin, c’était le fils de ma sœur Catherine. Il venait de se marier et il profitait de cette circonstance pour refaire connaissance avec sa famille bourbonnaise ; car il n’était jamais revenu depuis l’époque où ses parents l’avaient amené tout gamin. Ma sœur et son mari, n’ayant que cet enfant, l’avaient tenu dans les pensions jusqu’à dix-huit ans. Bachelier, il était alors parti au régiment pour un an, et il occupait depuis un emploi de comptable dans une grande maison de commerce.

Georges et sa femme venaient directement chez nous avec l’intention d’y faire leur principal séjour, une de mes nièces d’Autry leur ayant écrit que c’était moi qui pouvais le mieux les recevoir. Quand nous parvint la lettre annonçant leur arrivée, Rosalie s’exclama :

— Des Parisiens ! Ce qu’ils vont en faire des embarras ! Ça va parler gras, mes amis…

Victoire, très ennuyée, se demandait où elle allait les faire coucher et quels aliments elle pourrait bien leur préparer. On discuta et, finalement, il fut décidé que nous donnerions à nos hôtes le lit de la chambre où couchaient Charles et mon filleul, le petit Tiennon, le fils de Jean et de Rosalie : eux prendraient à la cuisine le lit du pâtre qui consentit à s’accommoder d’un gîte au fenil avec des couvertures.

Le jour venu, Charles emprunta la bourrique d’un cantonnier du voisinage, l’attela à notre charrette que nous conservions toujours, bien qu’elle nous fût inutile ici, et il se rendit à la rencontre des Grassin qui devaient débarquer à Bourbon par la diligence de Moulins, vers cinq heures du soir.

Ils arrivèrent chez nous un peu avant la nuit. J’étais en train de conduire les fumiers ; d’une rue transversale je débouchai avec un char vide presque en face d’eux dans la grande rue, à deux cents mètres de la cour.