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menés en captivité, avaient été condamnés à plusieurs années de forteresse pour avoir voulu s’évader ; on les renvoyait seulement à l’expiration de leur détention. Alors cette pauvre femme vécut dans la terreur constante de voir revenir son premier époux. Il ne revint jamais. Néanmoins, des bruits coururent à son sujet qui, avec le temps, se transformèrent en légende. Des gens prétendirent l’avoir vu à Bourbon, et assurèrent qu’il s’était déterminé à disparaître sans se montrer pour ne pas créer de difficultés à son ancienne femme, nantie d’un nouveau mari.


XXXVIII


Mon Jean rentra dans les premiers jours de juin, à temps pour les foins. Les épisodes de son séjour en Algérie l’avaient rendu un peu sans-souci. Dans la crainte qu’il en eût trop de peine, on s’était abstenu de lui annoncer la mort de sa fiancée. Il accueillit cette triste nouvelle, en arrivant, aussi doucement que possible.

— Pauvre petite Louise, je ne m’attendais pas à ça ! dit-il simplement.

Mais il n’en perdit ni un repas ni une sortie. Et, moins d’un an après son retour, pour le carnaval de 1872, il épousa une fille de Couzon qui s’appelait Rosalie.

Deux mois après, à Pâques, ce fut le tour de Clémentine qui s’unit à François Moulin, du Plat-Mizot, le sixième d’une famille de neuf.

La bru et le gendre vinrent tous deux s’installer à la Creuserie, ce qui nous permit de supprimer la servante et le domestique que nous prenions d’habitude. Seu-