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circonstances où elle avait été faite, comme celle du degré d’instruction de celui qui l’avait écrite. Il y en eut une longue certain jour qui donnait des détails si navrants que tout le monde pleura. Plusieurs, œuvres de mauvais fumistes, contenaient des plaisanteries grossières, jusqu’à des insultes.

Roubaud ne tenait pas à se charger des réponses, prétextant qu’il avait trop d’occupations, mais plutôt en raison de son manque d’habileté. Clémentine s’en allait trouver, au bourg de Franchesse, la fille de l’épicière qui savait écrire ; elle était obligée d’y aller exprès la semaine, car, le dimanche, les clients de l’épicerie venaient en grand nombre pour le même motif relancer cette jeune fille.

L’ignorance sembla dure pendant ces mois-là, parce qu’on en eut conscience plus qu’à l’ordinaire.

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À ce triste hiver succéda un printemps troublé. La guerre avec l’Allemagne avait pris fin, mais c’était la guerre encore : Paris en révolte luttait contre l’armée. Pendant que la nature, magnifiquement, s’épanouissait dans sa jeunesse annuelle, du sang français coulait toujours !

Paris fut vaincu, les révoltés massacrés par centaines, par milliers, et nos guerriers revinrent. Ils revinrent tous, moins ceux des dernières classes qu’on gardait pour leur temps de service, — et Charles fut du nombre, — moins aussi, hélas ! ceux qui étaient morts, et les disparus dont on ne savait rien. Le mari d’une petite jeune femme de Saint-Plaisir était dans ce cas. Nulle nouvelle de sa mort n’était parvenue, mais, depuis novembre, il avait cessé d’écrire et il ne reparut pas. Trois ou quatre ans plus tard, la petite femme se remaria. Mais voilà qu’après, on lui dit que des soldats de 70 arrivaient toujours ; c’étaient de ceux qui, em-