Page:Guillaumin - La Vie d’un simple, 1904.djvu/225

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Aux deux premières séances, il y eut bien une centaine de présents auxquels on apprit à marcher au pas et en ligne, à porter le fusil et à s’en servir. À l’issue du deuxième exercice, la petite troupe traversa la ville en bon ordre, entraînée par le garde-champêtre tambourineur et le clairon des pompiers, et encadrée par une bande de gamins enthousiasmés. Le docteur exultait ; il offrit du vin, — un litre pour trois, — et du pain blanc. Mais il eut la malencontreuse idée de faire installer à la mairie, pour parer aux éventualités possibles, une garde permanente de dix hommes. Installée le lendemain, la garde permanente ne dura que trois heures. Le sergent Colardon, menuisier, chef de poste, déserta le premier parce qu’on vint le chercher pour faire un cercueil.

— Travail urgent ! expliqua-t-il avec raison.

Les autres ne tardèrent pas de s’esquiver à leur tour, sous différents prétextes, et la mairie fut abandonnée. Furieux, le docteur alla trouver le vieux rat-de-cave capitaine et lui demanda de punir sévèrement les coupables ; mais le bonhomme lui rit au nez et le poste permanent ne fut pas renouvelé. À l’exercice, les répondants se firent d’ailleurs de plus en plus rares. Dès la troisième séance, il n’y en eut plus que cinquante, à la quatrième, vingt, à la cinquième, huit, et à la sixième, il ne vint que M. Fauconnet et le capitaine. Telle fut l’histoire de la garde nationale de Bourbon.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

À la terreur que causait la perspective de l’arrivée des Prussiens, vinrent s’ajouter des fléaux malheureusement très réels. Ce fut d’abord le froid qui commença de bonne heure et devint de plus en plus rude. Puis survint une épidémie de petite vérole qui fit de nombreuses victimes. Chez nos voisins de Praulière, le mal sévit violemment, si violemment qu’il causa,