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voisins s’intriguèrent de cette tolérance ; on me guetta ; on vit que je faisais des haltes à la maison et cela fit jaser. La chose ayant été rapportée à M. Parent, il donna congé à la Marianne qui s’en fut habiter au-delà du bourg de Franchesse, sur la route de Limoise : nos amours frauduleuses en restèrent là.

Le père Giraud, à qui ces bruits étaient parvenus me prit à part un jour et me tança d’importance. Mais Victoire, fort heureusement, ne sut jamais rien de l’affaire.


XXXI


De diverses façons, les progrès du siècle arrivaient jusqu’à nous. Ils avaient pourtant des ennemis outranciers : chacun dans leur sphère d’action, M. Gorlier, le propriétaire, M. Parent, le régisseur, et ma femme, faisaient leur possible pour retarder l’essor général.

Les écoles commençaient à se peupler. Les commerçants du bourg et les plus huppés des campagnards y envoyaient leurs enfants ; il y avait aussi quelques places gratuites pour les pauvres, dont bénéficiaient surtout les petits des métayers du maire.

J’aurais bien voulu que mon Jean sût lire et écrire pour qu’il soit capable de tenir nos comptes. M. Frédéric était conseiller municipal et ami du maire ; je me dis qu’il serait peut-être sage de lui en parler. Donc, un jour qu’étant venu chez nous, il félicitait le petit Jean sur sa bonne mine, je risquai timidement :

— Monsieur Frédéric, il lui faudrait à présent quelques années d’école.