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Comme, en même temps, le travail de la terre donnait, comme il fallait bêcher le jardin, faire les semis d’orge, d’avoine et de pommes de terre, on peut croire que je n’avais pas à rester les deux pieds dans le même sabot ; j’en vins à perdre presque l’habitude de dormir, et ce n’est pas au cours de l’été que je pus la reprendre.

Au cours de l’été, j’allai travailler dans les domaines comme journalier. J’aurais bien eu assez de besogne dans ma locaterie, mais je craignais que les recettes ne soient insuffisantes si je ne gagnais rien au dehors. Quand je rentrais vers dix heures du soir il y avait toujours quelque chose de pressant à faire chez nous, et je me remettais à l’œuvre au clair de lune. Le voisin Viradon m’avait conseillé de faire du jardinage, parce que les légumes se vendaient bien au moment de la saison, quand la ville se peuplait d’étrangers. Je restais donc souvent jusqu’à une heure du matin à sarcler et à arroser. À trois heures, je repartais au travail. Victoire avait cessé momentanément de faire les tournées de lait, les vaches touchant à leur terme n’en donnaient plus, mais elle put vendre quelques têtes de salade et quelques paniers de haricots dont le produit suffit aux besoins courants du ménage.

À la Saint-Martin, nous eûmes la satisfaction de payer sans délai le propriétaire et de rembourser au père Giraud la moitié de la somme qu’il nous avait avancée.