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osées : en somme, des mensonges, des médisances, des bêtises…

De ce repas funèbre, seules, les chansons furent bannies.

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Ce fut peu de temps après la mort de ma grand’mère que ma sœur Catherine nous quitta pour aller servir, à Moulins, chez une parente de Mme Boutry.

La Catherine avait alors vingt-quatre ans. De physionomie sympathique, elle avait plu tout de suite à la Dame qui la faisait aller chez elle fréquemment pour aider la bonne. Ma sœur prit goût à ce qu’elle faisait et voyait faire dans cette maison ; elle adopta bientôt les manières polies et soumises qu’il faut pour servir les riches ; elle en vint même à prendre une certaine familiarité respectueuse avec les Boutry qui lui étaient bons. Elle aimait un garçon de Meillers, un nommé Grassin, qui était au service et auquel elle avait juré d’être fidèle. Depuis cinq ans déjà elle tenait sa promesse, sortait peu et ne se laissait aucunement courtiser. Grassin lui écrivait trois fois par an : au premier janvier, dans le cours du printemps, à la fin de l’été. La Catherine attendait avec impatience ces lettres qui, cependant, lui causaient beaucoup d’ennui : car elle ne savait à qui s’adresser pour les faire lire, ni pour faire écrire les réponses. Elle économisait sur ses effets pour obtenir de ma mère l’argent nécessaire au libellé et à l’expédition de ses missives. Or, après quelques mois, elle avait fait aux propriétaires l’aveu de son roman et ils s’étaient chargés de la correspondance. Puis, voyant qu’elle mettait de la bonne volonté à leur être agréable et qu’elle avait des dispositions pour le service, M. et Mme Boutry eurent cette pensée de la caser en ville. Grassin étant brosseur d’un officier, ils