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sur vous ! Je suis envoyé vers vous par la belle Orable, à laquelle vous avez fait présenter, par le vaillant Aquilant, un épervier et un anneau. Je viens vous annoncer — à quoi bon le cacher ? — que Thibaut l’a épousée, que les noces ont été célébrées au château d’Orange, et — pourquoi mentir ? — qu’elle a reposé à ses côtés. La demoiselle qui vous a tant aimé, est si profondément chagrinée que vous n’ayez pas prévenu l’émir en l’épousant, que, je vous jure, qu’elle ne fait que pleurer nuit et jour. Elle vous conjure au nom du Dieu tout-puissant, de venir la secourir à Orange. Et elle vous envoie ce pennon de soie, afin que vous le portiez au combat.

Guillaume écouta cette nouvelle la tête penchée sur la poitrine : il prit la banderole des mains du messager et la mit dans son sein, puis il dit :

— Ami, retournez chez vous et dites à votre dame que je continuerai à bien l’aimer. Si Dieu me fait la grâce de me prêter vie jusqu’à ce que je sois armé chevalier, elle me verra revenir à Orange pour montrer ce que je sais faire de ma bonne épée. Et si je réussis à rencontrer le roi Thibaut, aussi vrai que j’ai besoin du secours de Dieu ! il paiera cher son audace ; il peut être assuré que je lui couperai la tête.

Sur ce il appela deux chevaliers et leur dit :

— Barons, ayez soin de ce messager ; faites-le bien dîner et donnez-lui de l’or et de l’argent, afin qu’il puisse retourner dans son pays.

Obéissant à ces ordres ils conduisirent le messager au bourg où ils le firent changer d’habits et dîner. Quand il eut mangé et bu à loisir, on lui donna cent sols ; il monta sur un cheval frais qui lui fut offert, et se mit en route en sortant par la grande porte.

Cependant l’empereur Charles était mécontent que jusqu’ici Guillaume eût refusé d’accepter les armes qui lui avaient été offertes.