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— Mon empereur, entendez-moi. Je vous prie de me permettre de me mesurer avec ce Breton.

— N’en fais rien, répondit l’empereur : tu es trop jeune, à peine as-tu vingt ans, et ce Breton tout enflé d’orgueil te tuerait du premier coup.

Mais Aymeric intervint en disant :

— Sire, laissez-le aller. Et par l’apôtre qu’on va implorer à Rome ! s’il est vaincu par ce Breton, il n’aura jamais de moi un denier monnayé ; il pourra aller pieds nus et en chemise vivre en exilé sur la terre étrangère ; car de la mienne il n’en héritera jamais la largeur d’un pied.

Le roi accueillit ces paroles avec un sourire, et cria à Guillaume :

— Ami, allez au nom de Dieu.

Guillaume, à ces mots, courut tout joyeux à l’encontre de son adversaire, et ramassant l’écu qui gisait sur les dalles ainsi que le bâton, il dit au Breton :

— Allons, viens ici, et montre-moi comment il faut frapper.

— Jeune fou, répondit le Breton en se tournant vers lui, retire-toi : je t’assommerais du premier coup.

Guillaume lui répondit tout en colère :

— Misérable fanfaron, avec ton gros cou, tu ressembles à un chat en maraude. Tu es sorti de chez toi par esprit de rodomontade ; eh bien ! rends-moi ton écu et ton bâton, jure-moi en présence de l’empereur que de ta vie tu ne feras plus le champion, et je te laisserai partir d’ici sain et sauf. Si tu ne fais ce que je te dis, je jure Dieu qu’en sortant d’ici, tu n’iras te vanter dans aucune cour d’avoir vaincu les écuyers de France.

Le Breton enragea en entendant ces paroles et courut sur Guillaume, le bâton en l’air, pensant le tuer du premier coup. Mais celui-ci se défendit bien. Tout le palais retentit de leurs coups formidables. De quelque part que le Breton se tournât, il trouvait toujours le jeune homme devant lui, ripostant par des