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— Thibaut d’Arabie, vas à l’attaque plein de confiance : quand tu auras démoli ce château, les Français seront vaincus à tout jamais.

Thibaut ôta son gant droit et l’offrit à l’idole comme gage de sa reconnaissance, promettant qu’il ajouterait cent marcs d’or à la statue. L’homme caché dans l’intérieur accepta le gage. Les païens crurent à un miracle et tous se prosternèrent en se frappant la poitrine.

Avant qu’ils se fussent relevés, les Français, du haut des murs, lancèrent sur l’idole des pierres et de gros morceaux de bois, et firent tant qu’ils la renversèrent.

— Ah ! mauvais Dieu, s’écria Thibaut, tu n’as pas plus de puissance que cela ? Tes miracles ne valent pas un fétu.

En disant ces mots, il lui porta un coup furieux d’un gros bâton qu’il avait à la main, si bien qu’il faillit la mettre en pièces. Ce que voyant, les paiens s’écrièrent :

— Mauvais roi, sois maudit ! Pourquoi offenser Mahomet ? Ne vois-tu pas ces pierres ? Ceux de la ville l’ont attaqué par trahison, sans cela il s’en serait bien moqué.

Thibaut n’osa répliquer : il enfourcha son cheval, et courant du côté où il aperçut Hermengard, à une fenêtre du château, il lui dit, d’un ton où perçait le découragement :

— Noble comtesse, je te salue au nom de ton Dieu ! Je te supplie de m’accorder une trève d’un mois.

— Seigneur, répondit-elle, je vous l’accorde ; mais je demande des sûretés. Livrez-nous des ôtages qui répondent de vous.

Thibaut fut on ne peut plus content. Il lui envoya quatre rois de sa nation, qui devaient être pendus, s’il s’écartait le moins du monde du traité conclu.

Les trèves conclues, Thibaut fit appeler le roi Mathusalan, Aarofle et Albroc-le-Persant et leur dit :

— Barons, je vais vous quitter pour quelque temps : en attendant je vous confie mon armée. Faites bonne garde autour de la ville. Je vous rends responsables des pertes