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tons, qu’ils ne veulent même pas me laisser mes culottes ? Je vois bien qu’une prière n’y ferait rien ; que Dieu me confonde, si je ne les punis pas !

Qui lui eût vu relever la tête, serrer les dents, et changer de couleur, eût à bon droit ressenti de la peur.

— Certes, poursuivit-il, d’eux je n’attends ni merci ni miséricorde. Mais l’abbé, notre maître, m’a permis de laisser éclater ma colère, quand on voudrait me prendre mes culottes et ma ceinture, et j’aimerais mieux mourir que d’attendre plus longtemps, car ils sont méchants et féroces.

À ces mots il leva le poing, et en donna un tel coup à la face du capitaine qu’il lui cassa le cou et le jeta mort à ses pieds. Il en tua un deuxième de la même façon : puis il en saisit deux autres et les heurta si fortement l’un contre l’autre qu’ils eurent le crâne fracassé. Un cinquième et un sixième tombent frappés par son poing redoutable ; il prend le septième par les cheveux, le tourne trois fois en l’air et lui fracasse la tête contre un chêne, en disant :

— Quand celui-ci se relèvera, il n’aura pas envie de chanter. Il fut bien fou d’en vouloir à mes culottes. Si quelqu’un en a encore envie, qu’il s’avance, et il portera la marque de mon poing de manière à ne plus se relever et à ne plus jamais nuire aux braves gens qui passent leur chemin.

Le reste des larrons fut pris d’épouvante.

— C’est le diable en personne, s’écrièrent-ils ; s’il continue, aucun de nous n’échappera.

Ils se rallient et dardent sur lui leurs lances et leurs traits ; mais Dieu le sauva, il ne fut pas atteint.

— Dieu ! s’écria Guillaume, protège-moi contre ces infâmes larrons ! Notre abbé béni commit un grand péché quand il m’envoya ici en si pauvre équipage, sans mon haubert, mon heaume et ma bonne épée de Vienne. Ah ! si j’en étais armé, j’aurais défié une cinquantaine de ces maudits brigands. Il y a plusieurs épées par terre, mais il faut les