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plus qu’une branche d’olivier. Jamais je n’aimerai les méchants et les traîtres. Il en coûterait trop à Guillaume pour m’embaucher de nouveau. Je ne suis nullement à ses ordres, et son message ne me fera pas retourner en arrière. Je ne reviendrai que pour démolir Orange, dévaster le pays, brûler le palais de Gloriette et couper la tête au marquis.

Quand les chevaliers entendirent les vociférations de Renouard, ses menaces contre Guillaume et les injures adressées à eux-mêmes, la honte leur monta au cœur, et ils se dirent :

— Nous ne valons pas grand’ chose, si à nous vingt nous n’amenons pas ce ribaud.

Ils s’élancèrent sur lui, pour le lier ; mais ils auraient tout aussi bien pu se ruer contre une tour.

Lorsque Renouard sentit qu’ils mettaient la main sur lui, il enragea de colère. Il ne pensa pas à son épée — son tinel avait été brisé dans son combat contre Bauduc ; — mais il y avait près de là une cabane qu’un hermite avait fait construire ; Renouard y courut et en arracha un poteau que deux chevaux de somme auraient eu de la peine à porter ; il le mania comme si c’eût été une branche d’olivier. Alors commença la chasse aux chevaliers. Il en jeta cinq par terre, avec tant de force, que le sang leur sortit par la bouche. Puis s’appuyant sur sa grande perche, il leur dit :

— Laissez donc vos menaces, lâches poltrons ! M’avez-vous pris pour un pauvre pâtre qui n’oserait vous toucher par crainte de Guillaume ? Je ne suis pas un lièvre auquel on fait peur ; n’est-ce pas moi qui ai tué le fort roi Haucebier ?

Cela dit, il s’élance vers les quinze autres, qui s’enfuient par crainte de la grande perche qu’ils lui voyaient manier avec tant de facilité. Ils ne cessent d’éperonner leurs montures que lorsqu’ils arrivent à Orange, croyant toujours avoir Renouard à leurs trousses. Et celui-ci leur crie :

— Envoyez-moi donc Guillaume, pour que je puisse me battre avec lui !