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— Je vous rends votre fief, je ne veux tenir de vous la valeur d’un bouton ; dorénavant je ne suis ni votre vassal ni votre ami. De gré ou de force vous viendrez à mon secours.

Hernaut à la barbe rousse se dressant sur ses pieds, dit à Guillaume :

— Fais attention à ce que je vais te dire ; laisse le roi parler comme il l’entend ; ne rends pas ton fief, et nous t’aiderons tous. Mes frères et moi, nous irons avec toi, et nous mènerons vingt mille hommes en Aleschant ; et les païens que nous y trouverons, c’est comme s’ils étaient déjà morts.

Aymeric intervint et dit :

— C’est un faible secours que nous lui promettons, tandis que nous devrions l’aider de tout notre pouvoir ; la France entière devrait marcher avec lui, puisqu’il est sénéchal et gonfalonier de l’armée. Si l’on prenait cela en considération, on viendrait à son aide ; et il aurait droit de se venger de celui qui refuserait. Mon fils est trop haut placé pour qu’on se moque de lui ; et par l’apôtre saint Pierre ! si je ne craignais qu’on reprochât à mes héritiers que j’ai commis une trahison mortelle, je ferais jeter une centaine des plus hauts personnages dans ma prison ; et tel est en ce moment le maître, qui bientôt serait traité comme le dernier des serfs. C’est ainsi qu’on doit contraindre le félon orgueilleux.

Aalis se rangea de leur avis, et parla ainsi :

— Monseigneur Aymeric, vous avez pleinement raison. Que celui qui lui fausse parole soit damné en l’autre monde, et que dans celui-ci on le pende comme un larron.

Et la reine dit de sa manière la plus gracieuse :

— Aymeric, père, je vous jure par le corps de saint Simon, que Guillaume pourra disposer de tout ce que je possède en France jusqu’au dernier sou, à la honte de ceux qui le délaissent.