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— Grâce, bel oncle, au nom de Dieu, le fils de la Vierge ! Voici mon corps, fais en ce que tu voudras. Fais-moi trancher la tête ou brûle-moi vive, exile-moi de France, si tu veux, je partirai comme une pauvre mendiante ; — mais accordez-vous avec mon père et avec ma mère, qui sera malheureuse toute sa vie durant. Elle a eu grand tort de parler contre vous ; pardonnez-lui cette folie, mon oncle ; et si jamais elle voulait vous contrecarrer, faites moi bouillir dans de la poix fondue.

Ces paroles attendrirent le comte, qui lui dit :

— Ma chère enfant, ma belle nièce, que Jésus vous bénisse. Levez-vous, vous vous donnez trop de mal.

— Je n’en ferai rien, mon oncle ; j’aimerais mieux être enterrée vive que de me lever, avant que vous m’ayez accordé ma demande, et que votre colère soit appaisée.

Hermengard se joignit à elle et dit à son fils de sa voix la plus douce :

— Beau fils Guillaume, au nom de Dieu, le fils de Marie ! n’outrage pas le roi en sa cour, ne fût-ce que pour ta nièce désolée, la plus belle fille de toute ta famille.

Et son père ajouta :

— Mon fils, dépose ta rudesse. Ta volonté sera accomplie ; vois comme le roi s’humilie devant toi et te promet aide et secours.

À ces mots Louis releva la tête et dit :

— Certes, monseigneur, tout ce qu’il désire.

Alors la colère de Guillaume se relâcha. Il se baissa pour embrasser la demoiselle à laquelle il accorda sa demande. Il mit l’épée dans le fourreau et la passa à Hernaut qui la mit de côté.

Aalis le remercia, et Hermengard de Pavie, dans sa joie, dépècha deux chevaliers de sa suite vers la reine.

Le duc de Normandie y alla avec Garin de la Gastie, et ils la ramenèrent bientôt toute tremblante dans la salle.

Le comte Guillaume lui prit la main et lui dit :