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le brave frère de Guillaume qui, avec plusieurs chevaliers, venait de convoyer le roi Louis. Lorsqu’il entra dans Orléans, les gens de la ville s’adressèrent à lui :

— Monseigneur, firent-ils, nous sommes fort malmenés. Un chevalier étranger nous a tué le châtelain et tant de bourgeois qu’on n’ose les compter ; et cela seulement parce qu’on lui a demandé pourquoi il traversait la ville tout armé.

— Savez-vous de quel côté il est allé, demanda Hernaut ?

— Oui, beau sire, du côté de Paris ; il a pris le chemin d’Étampes avec son grand cheval tout bardé de fer.

Hernaut, à cette nouvelle, demanda ses armes : il endossa le haubert et laça son heaume, sauta sur son cheval, et avec dix chevaliers sortit d’Orléans au galop. Il eut bientôt atteint le comte Guillaume qui chevauchait doucement, ayant à la main une lance qu’il avait arrachée à un bourgeois.

Hernaut lui cria de loin :

— Par Dieu ! vassal, on t’apprendra à vivre. Retourne à la cité, afin que les gens du roi t’y jugent.

— Bien fou, reprit Guillaume, qui suivra vos ordres.

Là dessus il piqua des deux et rendit la main à Folatise. Son frère Hernaut courut sur lui de toute la vitesse de son cheval. Leur choc fut épouvantable ; leurs lances se brisèrent et Guillaume jeta son frère à bas de son cheval. Puis il lui dit en ricanant :

— Par Dieu ! vassal, il n’est pas de vos amis, celui qui vous envoya jouter contre Guillaume d’Orange. Vous êtes assez puni ; le marquis ne vous touchera plus.

À ces mots il lui ramena son cheval. Et Hernaut, tout ému, reconnut son frère autant à sa noble manière d’agir qu’à sa voix. Il sauta sur ses jambes et saisissant son étrier, il lui embrassa les genoux. Alors Guillaume se repentit de ce qu’il avait fait, quoiqu’il ne reconnût pas encore son frère ; il lui présenta son cheval et le pria instamment d’y monter. Hernaut lui dit :

— Beau frère, d’où viens-tu ? Je suis Hernaut. Je suis