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dait beaucoup de sang. Bientôt il rencontra un corps de Turcs commandé par Desréé d’Argolaine et par Bauduc, l’homme le plus méchant qu’on pût trouver jusqu’à la frontière d’Allemagne.

Tous deux, montés sur des chevaux excellents, étaient à la recherche de Guillaume. Lorsqu’ils le remarquèrent, ils se dirent :

— Quel est ce cavalier aux riches armes ? Allons tout de suite à sa rencontre.

Et s’étant un peu rapproché, Desréé dit à Bauduc, le fils d’Aiquin :

— C’est singulier, ce cavalier suivi d’un cheval bai ressemble par son armure à mon cousin Aarofle. Je pense qu’il a tué le comte, celui au court nez, le vilain cruel, car je suis sûr de reconnaître son cheval bai.

— Cependant, répondit Bauduc, par Apollon mon Dieu ! il ne se tient pas à cheval comme un Berbère.

Les deux Sarrasins éperonnent leurs montures et ont bientôt rejoint Guillaume. Bauduc, qui avait l’âme fière, porta la parole et lui demanda :

— D’où venez-vous si matin ? Et où allez vous, mon cousin ? Le comte, sans sourciller, répondit dans leur langue :

— Par Mahomet ! Bauduc, de l’Archant. Sous l’ombre d’un pin j’ai laissé Guillaume étendu mort ; je l’ai tué de ma main. J’ai laissé le roi Alipantin pour le désarmer. Moi je m’en vais, et j’emmènerai avec moi Acarin et Danebur et son frère Cahin et Haucebier, car dès ce soir je veux être à Orange ; je me rendrai maître de Guibor et du palais de marbre, qui demain s’ouvrira pour vous héberger.

Il passa son chemin en détournant la tête.

Les Sarrasins le suivaient des yeux, et remarquèrent le pan de la robe bordée d’ermine qui lui tombait jusqu’aux étriers ; et comme le lacet de ses chausses de mailles s’était rompu, ils virent qu’il portait dessous des chausses couleur