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la cause de ce tumulte. Il vit la mer étincelant de l’or d’Arabie, qui couvrait le tout, de manière à faire disparaître les vagues.

Alors le jeune homme commença à soupirer, et dit à ses compagnons :

— Vous le voyez, nous serons attaqués ; nous ne pouvons pas y échapper. Voici les Sarrasins. Aujourd’hui il faudra prouver ce que nous valons, et recommander nos âmes à Jésus.

Quand ils l’entendirent parler si fièrement, et qu’on vit avancer la flotte à tant de voiles, qui couvrait la mer sur une étendue d’une lieue, et qu’on entendit les cris rauques des ennemis et les sons perçants de leurs trompettes, le plus hardi des hommes de Vivian se mit à trembler et changea de couleur.

— Que la sainte Vierge nous soit en aide, se dirent-ils, car on voit bien que notre fin est proche.

Vivian, à ces paroles, secoue la tête et roule les yeux.

— N’ayez pas peur de ces mécréants, dit-il ; quoiqu’ils soient en grand nombre, Dieu ne combat pas pour eux. Suivez-moi sans crainte, l’épée au poing. Celui qui meurt, son âme va droit en paradis ; Dieu sera avec nous, et il ne reculera pas devant cette race infidèle.

— Vivian, dit Guérin après avoir regardé les ennemis, c’est une folle entreprise, ils sont trop nombreux. Envoyez vers Guillaume le plus vite possible, et nous avons la chance d’être secourus.

Girard de Commarchis, de son côté, fut d’avis de battre en retraite, puisqu’on était un contre soixante-et-dix. Mais Vivian leur répondit :

— Soyez sans crainte, mes amis, nous sommes jeunes et forts, nous avons de bonnes armes et de forts chevaux, et d’ailleurs nous croyons en ce Christ qui mourut pour nous et ces païens n’adorent que des figures dorées, dont une centaine ne vaut pas notre Dieu. Et enfin j’ai juré que je ne