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étroitement faisait ressortir la beauté de sa taille. Une demoiselle du nom de Rosiane — elle était nièce de Rubiant — l’éventait avec un éventail d’argent.

Quand le comte Guillaume vit la reine, blanche comme la neige resplendissante et vermeille comme une rose, un frisson parcourut tout son corps. Il lui fit un profond salut et lui dit :

— Que le Dieu en qui nous croyons, vous protège !

— Barons, répondit la reine, approchez-vous. Que Mahomet, de qui toute chose dépend, vous ait en sa garde !

Elle les fit asseoir à ses côtés sur un banc incrusté d’or et d’argent.

Ils ne purent s’empêcher d’exprimer tout haut ce qu’ils sentaient.

— Mon Dieu ! fit Guillaume, c’est ici le paradis !

Et Guibelin faisant écho, ajouta :

— Jamais je ne vis rien de plus beau ! Je voudrais passer ici toute ma vie, je n’y demanderais ni à manger ni à dormir.

Cependant la noble dame commença à les interroger.

— D’où êtes-vous, nobles chevaliers ?

— Madame, nous sommes de la Perse et nous venons des états de Thibaut, votre mari. Hier de grand matin nous arrivâmes à la fameuse cité de Nîmes, croyant y trouver ceux de notre croyance, les rois Synagon, Otrant et Harpin. Mais ils avaient tous trois été mis à mort par Guillaume Bras-de-fer. Les Français nous firent prisonniers aux portes de la ville et nous conduisirent devant le marquis. Mais il est si riche et tellement entouré d’amis, qu’il ne se soucia d’or ni d’argent et nous renvoya sans exiger de rançon ; seulement il nous fit jurer sur notre foi de vous dire en son nom, de vous mettre en sûreté dans le royaume de Perse ; car avant que le mois d’Avril soit passé, il sera ici avec vingt mille guerriers, et ni murs, ni châteaux, ni tours ne pourraient vous défendre : ils seront