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pagne, avec Tortolose et Portpaillart-sur-mer, et la bonne cité de Nîmes et Orange qui a tant de renom. S’il vous donne cela, vous n’aurez pas à l’en remercier, puisqu’il n’en a jamais été maître et qu’il n’a jamais eu à sa solde un chevalier de ce pays. Il peut bien vous donner cette terre, sans que son royaume en soit grevé.

À ces mots Guillaume sourit.

— Neveu, dit-il, tu es né sous une bonne étoile. Moi aussi, j’y avais déjà pensé ; mais avant d’agir, je voulais prendre conseil de toi.

Ils se prirent par la main, montèrent les degrés du palais et entrèrent dans la salle où se tenait le roi. Louis se leva pour le saluer et lui offrit une place à ses côtés.

— Je n’en ferai rien, Sire, lui dit le comte. Si je suis revenu, c’est pour vous demander un don dont je me suis avisé.

— Que Dieu soit béni ! répondit le roi. Si vous désirez château ou cité, bourg, ville ou donjon, cela vous sera octroyé de plein gré. La moitié de mes états, si vous la demandez, je vous l’accorderai ; car je vous ai toujours trouvé fidèle, et sans vous je ne serais pas roi de France.

Guillaume sourit en répondant :

— Un tel don ne sera jamais requis par moi. Mais je vous demande la marche d’Espagne, avec Tortolose et Portpaillart-sur-mer, Nîmes et Orange. Donnez-moi cette marche ; la terre sera à moi, les trésors à vous, et vous y gagnerez mille chevaliers pour votre armée. Donnez-moi Nîmes et, Dieu aidant, j’en chasserai le mécréant Otrant, qui a tué tant de Français, qui en a tant dépouillés de leurs domaines. Voilà la terre que je vous demande : Nîmes avec ses grandes tours pointues, et Orange la cité redoutable, et le Nîmois avec ses prés le long du Rhône.

— Que Dieu nous soit en aide ! dit le roi. Un seul homme serait maître de tout cela !

— Laissez-moi partir, reprit le comte ; j’ai hâte d’arriver pour en chasser la maudite race païenne.