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Ils dépouillèrent les morts de leurs armes, garottèrent Richard et le lièrent sur un cheval, comme on met un coffre sur un sommier ; puis ils se mirent en route pour le camp.

Leur arrivée mit tout le monde sur pied.

— Oncle Guillaume, fit Bertrand, je vois l’acier de votre épée ensanglanté, et votre écu est entamé ; je suis sûr que vous avez commis une étourderie qui vous a donné bien du mal.

— C’est vrai, beau sire neveu, répondit-il. Quand je suis parti d’ici pour faire une tournée dans le bois, je vous laissai dormir, et n’ai pris avec moi que deux chevaliers. J’ai rencontré le vieux duc Richard avec quinze compagnons, qui me reprocha la mort de son fils et voulut se venger. Mais Dieu était pour nous. Nous en avons tué dix et le reste a pris la fuite. Voici les armes et les chevaux des vaincus, et voilà le duc Richard que je vous amène garotté.

— J’en rends grâces à Dieu, reprit Bertrand. Mais, cher oncle, il me semble que vous faites peu de cas de votre vie.

— Non, dit Guillaume ; mais je veux hardiment employer ma jeunesse, jusqu’à ce que le roi Louis ait recouvré tout son héritage.

Là-dessus ils se remirent en marche, et firent tant qu’ils arrivèrent à la cité d’Orléans, où ils trouvèrent le roi Louis.

Ils lui livrèrent leur prisonnier, qui fut jeté dans un donjon, où il mourut de chagrin et de faiblesse.

Quand le comte Guillaume eut assuré la couronne sur la tête du roi Louis, il laissa celui-ci à Paris et s’en alla à Mosterel sur mer (Montreuil), espérant s’y reposer et chasser en bois et en rivière. Mais son repos fut de courte durée, car les Français se révoltèrent de nouveau et la guerre civile vint brûler les villes et dévaster le pays. Louis ne put y mettre ordre.

Quand la nouvelle en arriva à Guillaume, il crut devenir fou de colère. Il appela Bertrand et lui dit :