Page:Guillaume d’Orange, le marquis au court nez (trad. Jonckbloet).djvu/124

Cette page a été validée par deux contributeurs.
121

fini. Il vous mande encore — et c’est chose cruelle à entendre, — qu’avant vêpres il vous traitera si honteusement que vous donneriez tout l’or de Besançon pour être loin d’ici.

— À la volonté de Dieu ! fit Acelin. S’il n’a pour moi que des outrages, je le défie. Porte-lui cette réponse.

— Je vous dis la même chose de la part du comte. Il vous déclare la guerre, à vous et à tous vos compagnons.

Acelin sentit son orgueil se révolter. Il se leva furieux et toisa Aleaume. Il examina ses mains et ses pieds, et vit qu’il les avait bien faits ; quand il reconnut qu’il avait affaire à un homme noble et de bonne éducation, il se contint et lui dit :

— Ami, beau frère, il ne sied pas à un gentilhomme de me tenir des propos honteux devant tous mes chevaliers. Quant à ton oncle, je ne donnerais pas un denier de sa vie, puisqu’il refuse mon amitié. Je lui promets que je lui trancherai la tête. Pas plus tard qu’aujourd’hui, je le ferai couper en morceaux par mes hommes. J’ai avec moi quatre comtes et plus de six cents chevaliers qui ne faudront pas à leur devoir. Et si tu n’étais messager, je te ferais traiter de même.

— Les gros mots ne nous font pas peur, dit Aleaume, et il sortit sans saluer. Il se remit en selle et traversa les rues au grand galop, avec la vitesse de la foudre qui tombe du ciel ; car il avait vu qu’Acelin armait ses hommes.

— Quelle réponse apportes-tu ? lui demanda Guillaume.

— Il n’y a pas d’amitié entre vous et lui, et il ne reconnaît pas Louis comme son roi. Il se promet de vous trancher la tête, et, n’eût été ma qualité de messager, je crois qu’il m’aurait fait jeter au feu ou à l’eau.

La fureur rendit la comte tout blême. Il ordonne de piller la ville et de mettre le butin en commun. Celui qui veut s’y opposer est tué. Les bourgeois veulent fuir ; le comte les fait arrêter et enchaîner.