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III.


Guillaume au court nez.


On apporte le bras de Saint-Pierre, on en arrache la châsse d’or et d’argent et on le fait baiser au comte. Puis, avec la relique on fait le signe de la croix sur son heaume, sa poitrine et son dos. Après cela nul homme ne peut lui faire du mal.

Aussitôt remontant sur son rapide destrier, il pend un fort écu à son cou et saisit une lance au fer tranchant. Il va tout droit au tertre qui s’élève en face du camp ennemi.

Les païens admirèrent le beau cavalier ; mais Corsolt, dirent ils, ne redouterait pas quatorze guerriers comme lui.

Galaffre, habillé et chaussé en roi, sortant de sa tente, aperçut le cavalier. Il envoya chercher Corsolt, et après l’avoir embrassé, lui dit :

— Beau neveu, voyez le Français sur la colline ; si vous l’attaquez, il ne s’en retournera pas.

— Il est mort, répondit Corsolt. Et puisqu’il est là, n’attendons pas plus longtemps. Mes armes !

Rois et ducs se mirent à courir et lui apportèrent son armure sous un arbre au large feuillage. Jamais on ne vit de telles armes ; si un autre homme que lui les eût portées, il n’aurait pu se mouvoir pour tout l’or du monde. Quatorze rois se mettent à l’armer. Ils lui font endosser une cuirasse et par-dessus un blanc haubert à doubles mailles. Puis il ceint l’épée, longue d’une toise et large d’un demi-pied, et prend son poignard, son arbalête et quelques javelines pointues. On lui amène son destrier Alion, si méchant et si vif que personne n’ose l’approcher. Quatre dards sont attachés à la selle, et à l’arçon de derrière pend une masse d’armes de fer.