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acte par acte, ou se trouvent sur un plan secondaire. Telles sont les critiques des amis les plus rigides du poète, de ceux qui craignent que son œuvre n’ait pas au théâtre un succès proportionné au mérite incontestable de ses détails et de son personnage capital. Nous renvoyons ces objections au savant auteur qui peut mieux que personne les réduire à leur juste valeur, ou en tirer parti.

Du reste, si elles ont quelque portée, elles tombent bien plutôt sur le sujet que sur l’ouvrage. Puisque l’histoire atteste, à notre honte, que nul n’a entrepris de sauver Jeanne d’Arc, comment le récit de sa mort offrirait-il une péripétie dramatique ? Un critique helvétien aurait voulu qu’Agnès Sorel fût mise en scène comme l’obstacle élevé entre la pucelle et le roi, pour expliquer au moins cette incurie homicide ; mais à quoi bon l’expliquer ? l’intérêt n’y gagnerait rien ; il est bien plus beau de l’excuser ; c’est ce que fait la bonne héroïne. Nous terminerons donc comme nous avions commencé, en exprimant le doute que la mort de Jeanne d’Arc soit un sujet aussi propre au théâtre qu’il le semble d’abord.

Convient-il mieux à l’épopée ? il serait bien intéressant de l’examiner, en passant en revue les poèmes qui lui ont été dédiés, depuis les douze fois douze cents vers de l’infortuné contemporain de Boileau, jusqu’aux touches si suaves du dernier monument que M. A. Soumet vient d’élever à la sainte guerrière : mais ce serait abuser à la fois de notre sujet et de l’attention de nos lecteurs.


Louis Guillard.




(Extrait du Rhône.)