Page:Guettée - La Papauté moderne condamnée par le pape Grégoire le Grand.djvu/54

Cette page a été validée par deux contributeurs.

pourrait croire que le mot de principat ou celui de prince des apôtres accordé à saint Pierre dérogerait à ce principe. Saint Grégoire a pris soin de nous prémunir contre cette fausse interprétation. Le saint docteur, en attribuant à saint Pierre le principat dans l’Église, ne l’a pas plus élevé, en réalité, que saint Paul. Il va nous le dire lui-même de la manière la plus claire. Nous lisons dans ses Dialogues[1] :

— « Pierre : Comment pourriez-vous me prouver qu’il en est qui ne font pas de miracles et qui cependant ne sont pas inférieurs à ceux qui en font ?

— » Grégoire : Ne sais-tu pas que l’apôtre Paul est le frère de Pierre, premier des apôtres, dans le principat ?

— » Pierre : Je le sais parfaitement, etc. »

Ainsi Paul a été l’égal ou le frère de Pierre dans le principat apostolique ; il fut au même titre que Pierre, premier et prince des apôtres. Pouvait-on dire plus clairement que, par ces titres, on ne voulait pas exprimer une dignité particulière, personnelle, exclusive ?

Dans un autre endroit, saint Grégoire regarde saint Paul comme ayant droit, aussi bien que saint Pierre, au titre de premier apôtre. En rapportant, dans ses Dialogues, la mort du prêtre Martin, il raconte que ce saint homme voyait Pierre et Paul qui l’appelaient au ciel : « Je vois, je vois, disait Martin, je vous remercie, je vous remercie. » Comme il répétait souvent ces paroles, ses amis qui étaient autour de lui, lui demandaient à qui il parlait. Il fut étonné de cette demande et dit : « Est-ce que vous ne voyez pas ici les saints apôtres ? N’apercevez-vous pas Pierre et Paul, les premiers des apôtres[2] ? »

Ainsi, d’après saint Grégoire, le titre de premier apôtre appartenait aussi bien à Paul qu’à Pierre.

Le même docteur ne regardait pas saint Pierre comme infaillible ; même après qu’il eut reçu le Saint-Esprit. Voici

  1. Saint Grégoire, Dialogues, liv. Ier, ch. 12.
  2. Ibid., liv. IV, ch. 11.