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puissant, qui, en changeant les pasteurs de son Église, conserve immuable la foi qu’il a donnée pour toujours aux saints Pères. Le prédicateur par excellence a dit : « Personne ne peut poser d’autre fondement que celui qui a été posé, c’est-à-dire Jésus-Christ » (1re aux Corinth., III, 11) ; donc, quiconque garde fermement la foi qui est en Jésus-Christ, avec l’amour de Dieu et du prochain, a posé en soi pour fondement le même Jésus-Christ, fils de Dieu et de l’homme. Or, il faut espérer que, où le Christ est fondement, l’édifice des bonnes œuvres sera construit dessus. La Vérité a dit elle-même : « Celui qui n’entre pas par la porte dans la bergerie, mais qui y entre par ailleurs, celui-là est un voleur et un larron ; mais celui qui entre par la porte est le pasteur des brebis. » Elle ajoute un peu après : « C’est moi qui suis la porte. » (Év. de saint Jean, X, 9.) Celui-là donc entre par la porte dans la bergerie, qui y entre par Jésus-Christ. Et celui-là y entre par Jésus-Christ qui pense et enseigne la vérité touchant le Dieu créateur et rédempteur du genre humain, et qui observe ce qu’il prêche. »

Telles sont les conditions auxquelles les pasteurs et les fidèles sont dans l’Église de Jésus-Christ. Saint Grégoire ne parle point de la nécessité d’être uni au siége de Rome.

Dans sa réponse à la lettre de communion d’Isace, évêque de Jérusalem, il enseigne la même doctrine et se sert des mêmes expressions[1]. Il y compare, en outre, l’Église à l’arche que Noë construisit avec des bois incorruptibles : « Notre arche, ajoute-t-il, est aussi composée de bois incorruptibles, puisqu’elle est bâtie avec des âmes fortes qui persévèrent dans le bien. » Grégoire se tient toujours ferme dans cette doctrine, et ne fait jamais la plus légère allusion à la nécessité d’être en communion avec l’Église de Rome.

Il ne faut pas, du reste, s’en étonner ; en effet, il ne considérait point le siége de Rome comme le siége unique de saint Pierre ; il reconnaissait expressément que les siéges

  1. Lettres de saint Grégoire, liv. XI ; lettre 46e.