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Soixante-six ans auparavant, on avait pu voir s’atteler à sa chute le royalisme blanc rentré en France en croupe des cosaques et des uhlans ; et ce que voulaient ces premiers « déboulonneurs », c’était faire leur cour, donner satisfaction à leurs « bons amis nos ennemis » ; c’était renier et biffer dans la mesure du possible non seulement les victoires agressives de l’Empire, mais encore et surtout les victoires de la Révolution défensives du sol national. Tandis que le but de la Commune — tel qu’il résulte des termes mêmes de son décret — était d’affirmer le principe de la fraternité humaine.

Considérant — disait le décret — que la colonne impériale de la place Vendôme est un monument de barbarie, un symbole de force brute et de fausse gloire, une affirmation du militarisme, une négation du droit international, une insulte permanente des vainqueurs aux vaincus, un attentat perpétuel à l’un des trois grands principes de la République française, la fraternité, la colonne de la place Vendôme sera démolie !

Mais, comme il s’agissait dans le premier cas du parti du trône et de l’autel, des souteneurs de la famille et de la propriété, ce qui était réellement un crime de lèse-patrie passa absolument inaperçu : pendant que dans l’autre cas, comme il s’agissait de républicains, de socialistes, ce qui n’était et ne pouvait être qu’un solennel hommage aux droits de l’humanité, à la paix entre les nations, devint un crime de lèse-patrie, que dis-je ! la preuve de la complicité des communalistes avec nos vainqueurs à aiguille de 1870.

C’est ainsi que des républicains mêmes écrivent l’histoire, l’histoire d’aujourd’hui ; car l’histoire de demain, la vraie, dira, qu’on en soit sûr, que le renversement de la colonne Vendôme, dans les conditions où il s’est opéré, sous le nez et à la barbe des armées prussiennes, était le plus sanglant soufflet qui pût être infligé aux victoires impériales et royales du nouveau Guillaume le Conquérant.