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les mêmes raisons… (Applaudissements sur certains bancs ; violentes protestations sur d’autres ; cris : Vive Jaurès !) les masses laisseront passer le premier sabre venu, comme après l’avortement, dans le sang de Juin, de la République de 1848, elles ont laissé passer le 2 Décembre de M. Louis Bonaparte. (Applaudissements.) En éveillant, par une simple apparence d’avènement au pouvoir, des espérances que vous ne pouvez pas réaliser, et en préparant ainsi pour demain des déceptions inévitables, vous n’aurez donc pas défendu la République, vous l’aurez livrée à la désespérance des masses. (Vifs applaudissements sur certains bancs, rumeurs sur d’autres.)

Tel est le premier revers de l’arme prétendue nouvelle que l’on voudrait mettre entre vos mains, mais il y en a d’autres : quand des gouvernants bourgeois se décident à faire une place dans leur sein à un socialiste, c’est-à-dire à l’homme qu’ils dénonçaient la veille comme l’ennemi né de toute société et de toute civilisation, c’est dans leur intérêt, ce n’est pas dans celui du socialisme. Leur but est « d’endormir » les socialistes, comme vous le rappelait Lafargue hier. C’est ainsi que le Gouvernement provisoire de 1848 n’a fait appel à Albert et à Louis Blanc, transformés en otages, que pour désarmer dans la mesure du possible les revendications ouvrières qui, alors, étaient appuyées par les fusils ouvriers. Il n’en a pas été autrement lorsqu’en 1870 un gouvernement dit de la Défense nationale s’est constitué et a fait