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LA DESCENTE AUX ENFERS



VII



Amen ! Et lentement d’abord, par intervalle,
Pâlit la vision funèbre et triomphale.
L’Ange avait fui ; la terre errait à l’horizon ;
Et moi, comme un convive au seuil d’une maison
Où, le banquet fini, s’éteint la flamme prompte,
Ébloui, j’hésitais devant la nuit qui monte.
Et le songe, au travers de mon sommeil confus
Poussant les flots houleux des ombres où je fus,
Dans une âpre rumeur, inexorable et pleine
De grincements de dents, de pleurs, de cris de haine,
Roulait des chants d’amour et des voix de pardon.

Et je m’éveillai dans l’angoisse et l’abandon.

Mais l’aube jusqu’à moi par la fenêtre close
Glissa. L’air était bleu, la montagne était rose,
Et sur les cèdres noirs le soleil souriant,
Comme un roi somptueux qui sort de l’Orient,
Vêtu d’or, émergeait des nuages opaques.
Le ciel étincelait sur l’aurore de Pâques ;
Et les flambeaux sacrés sur les autels récents
Allumaient, dans la nue éparse de l’encens,
Un autre ciel plus proche au fond des catacombes.
Et les fleurs renaissaient aux fissures des tombes,