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Il se taisait. Abbâ Sarapamôn leva
Son front et sourdement dit : — Par le Seigneur, va,
Maudit ! rejoindre enfin tes frères dans l’abîme !
Assez mentir, Satan ! Meurs ! —

                                                         La Syrinx sublime
S’enfla profondément et les lions royaux
Semblèrent rugir tous au creux de ses tuyaux.
L’éléphant y barrit et les cerfs y bramèrent,
Et, mugissant aussi, les taureaux s’alarmèrent
D’unir leurs beuglements aux hurlements des loups.
La chanson de l’oiseau filtra par les sept trous.
Et l’univers sonore, ouvrant tous ses cratères,
Heurtant de tous ses flots les rochers solitaires,
Par tous ses aquilons soufflant dans tous ses bois,
Écho de tous les bruits, fondit toutes ses voix
Dans la tonnante voix de l’Âme universelle :

— Silence ! Je suis Pan, je suis Tout ! Je recèle
Tout être et toute chose en mon sein radieux.
Suis-je le père auguste ou le fils des grands Dieux ?
Qui le sait ? Je suis né de tous ; je participe
A la vie, à la mort, à la chute, au principe,
Comme le feu subtil au foyer immortel,
Par mon regard humain à ta lumière, ô ciel !
Et par mes pieds de bouc a la matière infâme.
L’ardente volupté me brûle de sa flamme
Et l’éternel Désir, circulaire et sans freins,