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LA DESCENTE AUX ENFERS


Ô spectres, surgissez de vos funèbres lits
Pour adorer le Roi des siècles accomplis
Qu’annonçaient à Juda les voix prédestinées,
Le Sauveur attendu pendant cinq mille années !
C’est Lui. La Mort tragique a laissé choir sa faulx.
Ressuscitez, naissez, montez, chants triomphaux !
Ouvrez vos ailes d’ombre, esprits des races mortes !
Liberté ! pardon ! joie ! amour ! Ouvrez les portes !

Ouvrez les portes ! Tels les troupeaux vagabonds,
À l’appel du berger se rassemblant par bonds,
Désertent la vallée où le soir va descendre,
Tels, hagards et roidis encor, couverts de cendre,
Je vis, quand dans leur ombre entra le Fils de Dieu,
Les morts se soulever et surgir peu à peu
Et tordre les linceuls ardents de leurs épaules
Et briser les barreaux incandescents des geôles,
Et vers le Survenant glisser avec lenteur,
Et, libres, par milliers, te faire, ô Rédempteur !
Un cortège vivant au travers de l’abîme.

Premier-né du péché, lavé du premier crime,
Adam, le sombre aïeul, suit tes pas radieux.
Ô Christ ! L’aube divine emplit ses vastes yeux ;
Aussi fort, aussi beau qu’aux jours sereins et calmes
Où l’Eden innocent fleurissait sous les palmes,
Il contemple ses fils régénérés en Toi ;
Tous ceux que dans leur chair marqua la vieille loi
Et tous ceux dont les fronts, scellés du nouveau signe,