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LA DESCENTE AUX ENFERS

Flotte, noir et pourpré, sur leur milice infâme ;
Un glaive en feu serpente et se tord à leurs flancs ;
Les casques monstrueux de leurs cimiers brûlants
Laissent s’écheveler de flambantes crinières
Sur l’airain rutilant des armures guerrières ;
Et le chaud tourbillon qui ronfle par instants,
Gémit, fait palpiter sur les dos éclatants
Les ailes d’autrefois, ouvertes par surprise,
Qui se ferment soudain et dont l’essor se brise
Dans l’immobile effort des vols désespérés :
Les ailes sont de plomb.

Lentement, par degrés,
Le jour qui semblait poindre éteignait l’incendie.
Une fraîcheur baignait la paroi refroidie,
Et, fragile, inconnue aux souffles infernaux,
Une aube se mirait dans les ardents panneaux.

Et Jésus s’avançait.

Satan gronde et tressaille
Et crie : — À moi, démons ! Debout pour la bataille !
Debout, Béelzébuth ! Princes des morts, debout !
Quel mortel ou quel dieu franchit le seuil qui bout ?
Quel passant ignoré trouble, dans sa démence,
La vaste solitude et le Tartare immense ?
Réponds ! Qui donc es-tu, spectre humble et glorieux,
Ô toi, mort pour la terre et vivant pour les cieux,
Funeste dernier-né du sépulcre, fantôme