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Car c’est l’instant. Ce soir, sanglant, voilé d’horreur,
Le disque du soleil a la double apparence
Et les trois rayons bleus du signe avant-coureur.

Dans les vases d’airain l’huile est épaisse et rance ;
On a cherché les doigts aux mains d’un nouveau-né.
Et sa mère en hurlant maudit sa délivrance.

La lionne a gémi ; le chien a profané
Le sanctuaire impur et la chambre déserte
Où son vomissement sur la dalle a traîné.

Moi-même enseveli, tel qu’une idole inerte,
Dans mon abjection et ma stérilité,
Je ne conjure point l’opprobre de ma perte.

Avec les autres Dieux par l’orage emporté,
Au Pays sans retour où nous allons descendre
Je cacherai l’affront de ma divinité.

Tel qu’un pestiféré, sans voir et sans entendre,
Pour étancher ma soif, pour apaiser ma faim,
Je boirai l’eau bourbeuse et mangerai la cendre.

Les signes ont paru, mais l’anathème est vain ;
Et Mardouk foudroyé, qui tombe à la renverse,
Meurt et s’anéantit dans l’orgueil de sa fin.