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LA LAMENTATION D’IŠTAR

Portant leur Dieu caché dans l’Arche du Mystère,
Les Keroubim, vêtus d’une splendeur austère,
Tourbillonnent. Au loin dans l’espace envahi,
Se découpe le front du morne Sinaï.
Et dans la nue éparse et les vapeurs de soufre,
Le Tabernacle saint flotte au travers du gouffre
Et solitairement décroît dans la clarté,
Au murmure houleux de l’aquilon dompté.

Telle vogue au matin vers son port magnifique
La barque du Soleil sur le Nil pacifique,
Telles, vers le rivage où les accueille Hâthor
Sur le fleuve du ciel glissaient des barques d’or,
D’où les Dieux de Mousri, ceints de couronnes doubles,
Fixant sur l’horizon leurs yeux profonds et troubles,
Comme un bétail épais que rassemble un bouvier,
Suivaient dans l’air subtil l’essor de l’Epervier.
Et tous ces Dieux errants que la lumière inonde,
Peuplant l’azur sans borne et planant sur le monde,
Noyant tous leurs rayons dans l’océan du jour,
Voyaient monter Samas et, sur la grande tour,
Douzi, l’unique Époux, éclore, et d’un sourire,
Sol de Kar-Dunias ! éveiller ton empire.

Et voici que flambaient, au nord, à l’occident,
À l’orient en feu comme un bûcher ardent,
Les sommets empourprés dont le cirque domine
Le pays tout entier, que l’aurore illumine.
Et les fleuves jumeaux, traînant, lourds et gonflés,