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à la même poussière
Chassés d’un souffle égal, désespérés, hideux,
Quand le terme est venu, retournent tous les deux.
C’est l’heure ! Le soleil s’obscurcit ; et la lune
Et les astres éteints sombrent dans la nuit brune.
Les gardes du palais trébuchent au portail,
Et le vaillant chancelle, et par le soupirail
Celles qui regardaient voient monter l’épouvante
Et s’effriter le mur de la maison vivante.
La meule ne moud plus le grain improductif,
Et l’oiseau matinal trouble un sommeil tardif ;
La route est plus pesante et la côte plus âpre
Où s’embusque l’effroi, comme un spectre ; la câpre
Ne rend plus la vigueur aux muscles imprudents,
Et l’amande trop dure entre les vieilles dents
Est telle qu’un gravier qui grince entre deux roues.

Seigneur ! Voici qu’un siècle a sillonné mes joues
De sillons plus pressés et de trous plus nombreux
Que des ruisseaux de pluie au fond des vallons creux,
Voici que va se rompre au mur de la citerne
Le vase d’où s’échappe une eau fétide et terne ;
Et voilà que le jour est proche où je viendrai,
Sous les froides parois du sépulcre muré,
Dormir dans Ir-David où me suivra ma race.
Adonaï ! mes fils effaceront la trace
Des pas de Schelomo sur le sol paternel ;
Et le Scheôl vengeur, l’Abîme originel,
A cause du péché, dans l’immensité noire
Engloutira ma