Page:Guerne - Les Siècles morts, I, 1890.djvu/191

Cette page n’a pas encore été corrigée

En flots silencieux la nuit universelle.
Mais soudain tout s’arrête ; et voici qu’au sommet
De Millo, qu’un dernier flamboiement allumait,
Croissait, comme une tour au fond d’un incendie,
L’ombre de Schelomo, sur le peuple agrandie.
Le vieux Roi, tel qu’un Dieu las d’immobilité,
Sur le plus haut degré du trône déserté
Exhaussait lentement sa royale stature,
Tandis que, d’une gloire empourprant l’ouverture
Du Portique embrasé, le suprême soleil
Derrière lui mourait à l’occident vermeil.
Et le peuple, aveuglé par l’immense auréole,
Entendit Schelomo qui jetait sa parole,
Disant :

                — O vanité des vanités ! Et tout
Est vanité ! Voici que j’ai pris en dégoût
Toute chose fragile et toute vie humaine.
J’ai songé, j’ai tout vu. Le monde que Dieu mène
Comme un bloc impuissant oscille au même point.
Les fleuves, dans la mer qui ne déborde point.
S’engouffrent à la fois pour s’échapper encore.
Le soleil monte, luit, se couche et dans l’aurore
Ressuscite et se hâte en un cercle éternel.
Et moi, sage et très vieux, moi Roi sur Israël,
Moi, plein de jours et plein de gloire et de richesse,
Voici que j’ai sondé le puits de la sagesse,
L’abîme de l’esprit, le fond du cœur humain ;
Et n’ayant plus trouvé dans le creux d