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Et Laban, écartant la toile aux rudes trames,
Dans la tente secrète ouvrait les coffres bas.
Mais Rahel, ce jour-là souffrant du mal des femmes,
Resta devant son père et ne se leva pas.

Rahel gisait muette et pensive, étant celle
Qui dérobant la nuit les Therafim pieux,
Les avait enfouis dans le cuir de sa selle.
Et Laban dans le camp ne trouva point ses Dieux.

Alors levant les yeux comme un homme en prière,
Iaqob devant tous dressant un grand monceau,
Dit : — Qu’El-Schaddaï nous juge, afin que cette pierre
Sur le double serment repose comme un sceau ! —

Et Laban : — Que ce roc soit la stèle éternelle
Qui marque la limite où ma tribu campa !
Qu'lahvé, dans les temps, comme une sentinelle,
Veille des deux côtés sur Gal-Ed et Miçpa !

Que jamais plus, gardiens du pacte et du bornage,
L’Élohim d’Abraham, l’Élohim de Nahor,
Ne voient Laban franchir le Tas du Témoignage
Ni son fils Iaqob le dépasser encor ! —

Puis tous les deux, la main sous la cuisse, échangèrent
Le serment solennel, juré devant leurs Dieux.
Et, sur la pierre assis, tous les pasteurs mangèrent ;
Et le soleil baissait sur les monts radieux.