Page:Guerne - Les Flûtes alternées, 1900.djvu/94

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
87
le sanglier


III

LE SANGLIER


Nisa, puisque l’amour s’envole à tire d’aile,
Comme un oiseau léger, de ton cœur infidèle,
J’entrerai, seul et nu, dans l’épineux hallier
Que, depuis trois hivers, hante un noir sanglier.
Le bûcheron qui marche au bord du taillis sombre,
Lorsque le soir descend, l’entend grogner dans l’ombre
Et tremble ; le chasseur retient ses chiens sanglants,
Car le monstre, nourri de faînes et de glands,
Plus ardemment s’élance, et du sang des blessures
Rougit l’ivoire aigu de ses défenses dures.

Dédaignant l’arc solide et le fer et l’épieu,
J’irai jusqu’au profond roncier dont le milieu
Se creuse en bauge. Et là, soudain, la bête énorme,