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les flûtes alternées

À travers l’eau qui s’ouvre en tourbillons d’azur !
Nisa ! j’écarterai le Faune à l’œil impur
Qui d’un souffle lascif émeut la solitude.
Et moi seul, étendant mon manteau de poil rude
Sur la rive sonore où tu t’attarderas,
Palpitant et charmé, je te tendrai les bras ;
Et, tandis que brillant et tout humide encore
Du parfum virginal de l’eau qui s’évapore,
Ton beau corps chargera d’un poids fragile et doux
Le lit de mousse fraîche et de joncs, à genoux
Près de toi, librement, ô vierge belle et nue !
Ton Daphnis poursuivra sur ta lèvre ingénue
La libellule agile et frêle du baiser,
Et, frémissant d’amour et fier enfin d’oser,
T’initiera, dans l’ombre à jamais fortunée,
Aux jeux divins d’Éros, père de l’hyménée.