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à un jeune poète

La plainte du blessé sur le bord de la route,
Les râles, les rumeurs, les clameurs, les sanglots,
Le hurlement profond qui sort des vastes flots,
Le sourd frémissement des choses et des âmes.
Les musiques, les fleurs, les ondes et les femmes
Sont douces. Aime-les ; sois jeune, heureux, épris,
Je le veux ; mais sois grand, même quand tu souris,
Poète ! et que parfois ton œuvre, spectatrice
Du drame universel, se trouble et s’assombrisse
Ainsi qu’une forêt où se taisent les nids,
Tandis que, secoués de frissons infinis
Plus haut que l’ouragan qui hurle et se lamente,
Les chênes orageux grondent dans la tourmente.