que je l’attende, la main sur la poignée de la porte. A’c’t-heure si je pouvais gagner assez pour vivre et me faire enterrer sans être à la charge de mes enfants, c’est tout ce que je demande ».
Caroline la plaignait, mais inconsciemment, dans le désert de son cœur, elle enviait à la veuve cette peine vivante et habitée d’un grand amour.
Elle prit congé.
Passer sa vie à attendre, la main sur le bouton de la porte et travailler jusqu’au dernier souffle pour épargner les autres, une formule qu’on ne trouve pas dans les livres ! se dit Caroline tout en froissant le tapis de feuilles vineuses.
Au tournant d’une rue, le messager du journal lui jeta :
— On attend après vous, mademoiselle Caroline.
Assis sur un voyage de fer en gueuse, il disparut dans un train d’enfer.
— Rapportez-vous de la matière pour le journal ?
Contrairement à l’attente de Caroline, Philippe était d’excellente humeur. Il la félicita sur le travail accompli et projeta des changements dans la mise-en-page.
Les choses s’aplanissaient donc d’elles-même. Philippe cherchait à réparer son injustice et Caroline sentait l’abnégation la gagner : désormais elle s’effacerait.