Page:Guèvremont - Tu seras journaliste, feuilleton paru dans Paysana, 1939-1940.djvu/61

Cette page a été validée par deux contributeurs.

que ça soit la vérité. C’est comme si tu me disais : « Il fait clair ! » quand la grand’noirceur est arrivée : il fera pas plus clair pour ça. La vérité, ma petite fille, il s’agit pas rien que de la dire… il s’agit de la vivre ! »

Comment avait-elle pu résister à des paroles qui étaient la lumière même ?

Folle, folle, Caroline, qu’elle était ! Elle courrait à la gloire comme si la gloire est une monnaie courante qui adore ceux qui la cherchent.

Arcade avait repris :

« Tu m’empêcheras pas de penser que la plus grande gloire pour une femme qui a tout son bon sens, ça sera toujours d’avoir un bon mari… de le garder bon ; d’élever des enfants en santé et d’être reine et maîtresse dans une maison propre ».

« Je t’attendrai » avait-il dit en la quittant. Si une rencontre avec deux paysannes de Desneiges (comme on appelait couramment Notre-Dame-des-Neiges) ne lui eût appris la sympathie d’Arcade pour la nouvelle institutrice, elle serait peut-être retournée là-bas en toute confiance et elle n’eût pas attenté à ses jours.

La pensée de Caroline voyageait de Philippe à Arcade.

D’autres mots cruels avaient aujourd’hui pénétré comme une écharde dans son cœur : « Je n’ai besoin de personne ! »

« Mon Dieu ! éclairez-moi ! » suppliait Caroline.