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Au premier repas en commun qu’elle redoutait, Phonsine, autant pour dominer sa crainte que pour stimuler Amable, prétendit ressentir de l’appétit. Debout près de l’évier, elle emplit d’eau le gobelet d’étain et, après une première gorgée, elle dit :

— J’aurais le courage de boire la pompe.

Puis à table, elle renchérit :

— Je pense presquement que je vas dévorer la table toute ronde.

Tant d’exubérance étonna Didace. Gaiement, il dit à Phonsine :

— Prends ben garde de t’enfaler, la petite !

L’Acayenne prit place à côté de son mari. Au lieu de se servir, comme les autres, elle tendit son assiette en se faisant prier.

— Juste une lichette de maigre, près de l’os.

Du bout de sa fourchette, elle indiqua la plus tendre partie du rôti de porc, sans gras et sans ail, que Phonsine se réservait toujours.

Didace leva le filet et le donna à sa femme :