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Une légère distance sépare, au cœur même du village, l’église, le presbytère et le magasin de Sainte-Anne de Sorel. D’eux-mêmes les chevaux ralentissent, par habitude, auprès de la palissade à laquelle on les attache, à l’heure des offices.

Le cheval qu’Angélina conduisait de Sorel au Chenal, fit ainsi. Le soleil venait de se cacher. L’ombre d’un grand nuage trembla puis s’abattit sur la lande. Aussitôt l’or des liards se ternit. Trois ou quatre feuilles pâles virevoltèrent dans l’air mort. Mais au delà, la cime de quelques planes, encore ensoleillée, continua de flamber. Un frisson parcourut le dos de l’infirme. « En automne, le temps est traître », se dit-elle, en descendant du boghei. « On pense qu’on brûle. On n’a pas la tête revirée, qu’on gèle. L’automne !… »

Mais elle bannit vite de son idée toute mélancolie. Puisqu’elle avait oublié d’acheter du fil à Sorel, elle en prendrait chez le commerçant de Sainte-Anne. Et elle en profiterait pour arrêter au presbytère. Désappointée de ne pas trouver le curé Lebrun à fumer, en arpentant la galerie, comme il