— Quoi c’est ? demanda à Tit-Côme, Marie-Didace qui avait devancé le couple.
D’une voix flûtée trahissant déjà une légère suffisance, il expliqua avec condescendance :
— C’est la vache qui vient d’avoir son veau.
Dans l’herbe, près de la vache attentive à le lécher, le veau luisait, filandreux, son œil bleuté interrogeant l’espace.
Odilon, énervé, tempêtait après sa femme.
— Poigne la chaîne, Bedette, Hou donc ! mène la vache à l’étable. Remue-toi.
Bernadette leva les épaules de pitié.
— Pauvre Dilon ! pauvre homme que t’es ! Tu sais ben qu’elle voudra pas grouiller tant que son veau sera icite.
La vache partie, les enfants se dispersèrent. Sur le quai, un grand amas de laine séchait. Marie-Didace s’y jeta la tête la première. Didace, qui réparait son canot de chasse, sous le gros saule, pausa, le pinceau à la main, afin de mieux suivre les ébats de l’enfant.
— Tu goudronnes ?
Didace sursauta à la voix de Pierre-Côme Provençal qu’il n’avait pas entendu approcher. Lentement, posément, il répondit :
— Je goudronne !
Dans un regard, les deux hommes se mesurèrent :