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MARIE-DIDACE

de la messe, sur le perron de l’église, avec la grosse citrouille pour les âmes, les pommes de chou et les animaux de race.

Les rires filaient.

À l’écart Angélina les écoutait parler de Phonsine. Leurs propos légers lui faisaient mal au cœur. Est-ce qu’on demande à l’automne de ressembler au printemps ? Un arbre ne porte pas en même temps et la fleur et le fruit. La peine de Phonsine et l’entêtement d’Amable la bouleversaient.

Sachant Phonsine seule, elle partit pour se rendre chez les Beauchemin. En route, elle entra à la maison et prit un pot de géranium, avec l’intention de l’offrir à la jeune femme. « Ça la désennuiera », pensa-t-elle. Mais elle s’aperçut qu’elle avait choisi le plus gros ; elle se ravisa : un moyen ferait aussi bien. Après avoir regardé l’un et l’autre à plusieurs reprises, elle apporta le premier. Dans son cœur elle mesura le plaisir de Phonsine au sacrifice que l’offrande lui coûtait.

— Tiens, dit-elle en entrant, et s’exerçant à paraître indifférente, je t’apporte un petit bouquet.

Phonsine n’y prêta pas attention. Alors la voix de l’infirme se réchauffa :

— C’est un de mes fameux géraniums d’exposition, tu sais.