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MARIE-DIDACE

tenant que le coup est donné, qu’il parte ! Ça leur apprendra, ça leur apprendra !

Il lui semblait qu’une révolution jaillirait du départ d’Amable et rétablirait l’ordre dans les esprits. Après, la vie serait facile et juste, pour tout le monde.

Amable s’était redressé. Brusquement, comme s’il s’arrachait, il se mit à marcher à longues enjambées. Il courait presque, en déambulant le talus pour prendre la route tracée sur la glace. Cachée derrière les rideaux, Phonsine vit ses épaules voûtées et son bras libre qu’il balançait mollement. Puis, plus rien. Elle attendit au cas qu’il rebrousserait chemin. Mais non. Alors elle courut à la porte, cherchant à voir au loin. Le soir tombait rapidement. Même les buissons disparaissaient. Elle alluma la lampe et, pour mieux distinguer au dehors les traces d’Amable, la haussa au-dessus de sa tête. Près de la maison, deux trous seulement demeuraient visibles dans la neige, deux trous, comme des orbites vides, que la nuit violaçait.