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MARIE-DIDACE

— Pauvre Canard Péloquin ! s’apitoya Phonsine. On dira cinq pater, cinq ave pour lui, après la prière en famille.

— Une grosse perte pour la paroisse !

— Ah ! dit Amable, un vieux qui était en enfance depuis des années…

— T’es pas capable de comprendre ! T’as seulement jamais pris un fusil dans tes mains pour chasser. C’est lui, Canard, qui m’a montré à chasser, à tirer au vol plutôt qu’à la rasade de l’eau. Qu’il était donc fin ! Il avait réussi à dresser un vieux jars qui allait s’abander avec les canards noirs, puis qui les conduisait à ses canes, dret à côté de l’affût.

— Pourquoi que tu l’appelles Canard ? demanda l’Acayenne.

— Parce qu’il imitait le cri du canard, à s’y méprendre. C’était toute beauté de le voir tirer. Je me rappelle une avant-midi, pas ben des années avant d’arrêter de chasser, à lui tout seul il avait abattu cent cinquante-quatre canards, tous des courouges. Il en avait l’épaule toute bleue à force de tirer. À midi, il lui restait p’us une seule cartouche. Mon Péloquin a monté à Sorel à l’aviron se chercher des cartouches. Puis, toujours à l’aviron, il a descendu se replacer à l’affût. Et il en a tué encore quelques-uns comme une quarantaine. V’là ce que j’appelle chasseur !