— Me raisonner pour oublier le Survenant ? Jamais !
— Non, mais pour venir à bout de ta peine. Tu penseras encore à lui, mais d’une meilleure manière.
— Ah ! s’il avait voulu ! je l’aurais suivi pas à pas, comme son ombrage… comme Z’Yeux-ronds…
— Avant de connaître le Survenant, t’avais ta maison, tes fleurs. Tu les as encore. De plus pendant un an il t’a donné son cœur. Il t’a pas appauvrie ? T’as rien à regretter ? Et tu regrettes tout ! Sois plus raisonnable que ça.
Une hostilité subite brilla dans le regard d’Angélina.
— Le Survenant s’est toujours conduit envers moi en vrai monsieur. S’il avait agi autrement, je te dis ben franchement que je sais pas si j’aurais eu de quoi à lui refuser.
— Je veux pas dire ça, Angélina, protesta Marie-Amanda, chagrinée.
Le Survenant, appauvrir Angélina ? Il fallait donc que Marie-Amanda fût folle à lier pour penser des choses semblables. Lui qui a appris à Angélina à reconnaître ce qu’il y a de chantant sur la terre, lui qui parlait des fleurs comme de personnes avec qui il se serait trouvé en pays de connaissance. Et à Pâques, le cornet de bonbons qu’il lui avait donné en présent ?